CRÉATION
LITTÉRAIRE
ET
TERRITOIRES

Création littéraire et résidence d’écrivain
filet-rouge-150

La création littéraire en Lorraine peut prendre des formes diverses. Elle s’actualise notamment dans des dispositifs de résidence d’auteurs (lcdpu.fr/livre) qui en instituant du vivre-ensemble visent à favoriser la démocratisation culturelle par le biais de dispositifs de médiation participatifs au sein d’une relation triangulaire : écrivain, publics, institutions culturelles.

Les médiations culturelles désignent en fait les stratégies d’action culturelle centrées sur les situations d’échange et de rencontre entre les publics et les milieux culturels et artistiques.

« Se focaliser sur le phénomène de médiation, c’est mettre l’accent sur la relation plutôt que l’objet. »

Jean Caune, La Démocratisation culturelle, une médiation à bout de souffle, Grenoble, PUG, 2006, p.132.

Perspectives

Il s’agit ici de mettre en perspective, à travers une approche comparée en cours de réalisation, les formes de la création littéraire via le dispositif résidentiel, en fonction de 3 zones géographiques spécifiques :

  • le territoire lorrain
  • le territoire de la Grande Région (Sarre, Rhénanie-Palatinat, Wallonie, Luxembourg et Lorraine)
  • la province de Québec.

ESSAI DE DÉFINITION

La résidence d’auteur se définit comme un dispositif culturel spécifique fondé sur un couple un « entre-deux », c’est-à-dire une structure d’accueil (association, collectivité, institution…) et un auteur, en vue de réaliser un projet d’action littéraire en lien avec des publics visés et en fonction d’un modèle.
En tant que dispositif, procédant d’une demande sociale et politique qui émane très souvent des collectivités territoriales, la résidence apparaît comme une entité hybride dans la mesure où doivent en règle générale se combiner deux éléments essentiels dans une temporalité restreinte : création littéraire et activités de médiation autour de la littérature contemporaine. Faute d’un cadre réglementaire ou d’un statut, la résidence d’auteur est de nature polymorphe, marquée par une grande hétérogénéité (résidence individuelle/collective, pérenne/éphémère, fixe/itinérante…).

Toute résidence d’auteur se construit à partir d’une combinatoire de catégories normalisées mais cependant fluctuantes et extrêmement diversifiées :
• une territorialité, un lieu (un château, un phare, un appartement en ville, à la campagne…),
• une temporalité (d’un mois à une année),
• une structure-accueil (institution publique, structure culturelle, association…),
• des financements (publics/privés/partenariat),
• un projet de création littéraire déterminant l’œuvre produite par l’auteur-résident et un projet de médiation culturelle qui prévoit une liste d’activités autour de l’auteur destinées au public.

Ce type de résidence opère et institutionnalise une distinction temporelle établie par le CNL en réservant un pourcentage de temps à la création et un pourcentage aux actions culturelles ou littéraires. Son organisation doit permettre à l’auteur-résident de consacrer au minimum
70 % du temps à son projet d’écriture
30% maximum aux rencontres littéraires, aux médiations autour de son œuvre.

Murielle-Mayette-HoltzEntretien

Extrait d’un entretien accordé par Murielle Mayette-Holtz, Directrice de la Villa Médicis (Rome) à Carole Bisenius-Penin (juillet 2017).

Face à cette mythologie de la Villa qui imprègne fortement les discours de différentes sphères (journalistique, politique, culturelle…), en tant que modèle originel de la résidence, quelle est actuellement la fonction de la Villa Médicis ? Ses missions ?

Murielle Mayette-Holtz : La Villa Médicis est une ambassade culturelle française à l’étranger. Créée en 1666 par Louis XIV, l’Académie de France à Rome – Villa Médicis a pour mission fondatrice et centrale l’accueil d’artistes et de chercheurs pour leur permettre de poursuivre leurs travaux, études et recherches. Elle possède ainsi trois fonctions principales.

La mission Colbert qui est son essence même, mais qui ne peut se suffire à elle-même, c’est à dire un lieu d’accueil d’artistes fermé sur lui-même, une résidence, car la question de sa pérénité se poserait beaucoup plus cruellement. La mission Colbert a comme vertu aussi de permettre aux artistes de se croiser. En effet, les rencontres me semblent essentielles pas seulement pour la discussion, mais aussi pour la porosité des disciplines qui ne fait que s’accentuer dans la création, à l’instar des arts plastiques par exemple qui mixent les disciplines. Cela est également valable pour l’écriture littéraire. Cela me semble la première fonction de la Villa Médicis. D’ailleurs, cet aspect est fortement revendiqué par tous les artistes qui passent le concours, la possibilité offerte de rencontrer les autres pendant une année grâce à la bourse obtenue. Dans le cadre de la société de consommation dans laquelle nous évoluons, la fonction de ce lieu est, me semble-t-il, la possibilité de revendiquer le fait qu’il n’y ait d’obligation de résultats, de production obligatoire. Je revendique très fortement cette spécificité de la Villa Médicis car il s’avère particulièrement important pour un artiste, un écrivain de prendre du temps, même si cela peut être parfois compliqué avec la peur de ne pas arriver à produire ou le syndrome de la contemplation face à la beauté du site, mais après tout une année de contemplation, cela n’est pas si mal dans une vie d’artiste dans le cadre d’une résidence. Il faut de la patience pour que les artistes reçus à l’Académie de France à Rome deviennent les grands artistes de demain.

 

La mission Malraux ensuite, qui correspond à l’arrivée des écrivains en résidence en 1970, est une mission de programmation à la charge du directeur qui consistait dès sa création à mettre en place des expositions d’art. Aujourd’hui avec l’accueil des diverses disciplines (arts plastiques, littérature, musique, photographie…) les activités se sont étoffées avec des concerts, des projections en plein air, des lectures. J’ai souhaité ainsi regrouper ces diverses activités en proposant aux publics chaque année une véritable ouverture culturelle au sein de la Villa Médicis  par le biais de la rencontre avec deux artistes, grâce au dispositif des « Jeudis de la Villa ». Cela permet de faire se côtoyer les deux missions. Ainsi, dans la 2ème moitié de l’année, je demande aux pensionnaires de faire avec moi la programmation afin qu’ils puissent rencontrer les créateurs qui leur semblent particulièrement importants pour eux, ce qui permet de développer ce que j’appelle « un salon de l’intelligence ».

Enfin, la dernière mission est celle de restauration, du patrimoine. Il ne faut oublier que la Villa Médicis est une propriété française contrairement au Palazzo Farnese. C’est un site unique qu’il faut partager à travers des visites guidées ainsi que les événements culturels qui y sont organisés tout le long de l’année.

Références :

Bisenius-Penin Carole (dir.), 2014. Résidence d’auteurs, création littéraire et médiations culturelles (1). A la recherche d’une cartographie. Nancy : PUN – Éditions Universitaires de Lorraine.
Caillet Elisabeth, 2007. Accompagner les publics, la médiation culturelle, L’Harmattan, Paris.
Caune Jean, 2006. La Démocratisation culturelle, une médiation à bout de souffle, Grenoble, PUG.
Castan C., GuéraçagueM-L., 2010« Résidences d’écrivains (2) : les coulisses de la création », BBF, n° 4, p. 92-92 [en ligne] bbf.enssib.fr
Colleville N., 2010. « Résidences d’écrivains (1) : pour quoi faire ? », BBF, n° 4, p. 90-91 [en ligne ] bbf.enssib.fr
Herenguel É., 2010, « Les résidences d’écrivains en Grande Région », BBF, n° 6, p. 67-68 [en ligne] bbf.enssib.fr
Lafortune Jean-Marie (dir.), 2012. La médiation culturelle : Le sens des mots et l’essence des pratiques, Presses de l’Université du Québec.

Territoire lorrain

Résidence au sein d’un espace muséal

Maison Robert Schuman Scy-Chazelles (Moselle)

Une création commune : une résidence d’auteurs et un laboratoire hors les murs

Dans le cadre d’un appel à création partagée, l’unité de recherche de l’Université de Lorraine, le CREM (Centre de recherche sur les médiations), a souhaité développer un projet de création d’une « résidence d’auteur » et d’un « laboratoire hors les murs ». Il s’est rapproché de la Direction de la Culture du Conseil départemental de la Moselle, puis de la Commune de Scy-Chazelles et leur a soumis ce projet innovant de créer cette nouvelle résidence d’auteur dans la Maison de Robert Schuman, afin de permettre à des écrivains et des illustrateurs invités en résidence de mener à bien un projet d’écriture, ainsi qu’un projet d’animation littéraire élaboré conjointement en Moselle, étant entendu qu’est associée à cette résidence d’auteur, la création d’un laboratoire hors les murs.

Une résidence dans un espace muséal

La Maison de Robert Schuman est une demeure située dans le village de Scy-Chazelles en Moselle. Il s’agit de la résidence du « Père de l’Europe », Robert Schuman (1926-1963), héritier d’une double culture franco-allemande, dont l’engagement européen semble inscrit dans ses origines transfrontalières.

Cette maison a été restaurée par le département de la Moselle en 2004. Le site comprend également une extension muséographique abritant une zone d’exposition permanente sur la vie et l’œuvre européenne de Robert Schuman, ainsi qu’une salle d’exposition temporaire et un auditorium. Ce lieu propose en outre de nombreuses animations culturelles (concerts, spectacles, conférences…). Le site comprend ainsi la maison de ce grand amateur de littérature et son jardin. En effet, dès son plus jeune âge il se passionna pour les livres et les autographes : devenu adulte, il collectionna de nombreuses pièces rares, notamment des manuscrits d’écrivains du XVIIe siècle, comme celui écrit de la main de Montesquieu, relatant son séjour à Lunéville à la Cour du Roi Stanislas (Souvenirs de la Cour de Stanislas à Lunéville, 1747). Le Jardin des Plantes de Chez Nous appartient au réseau transfrontalier « Jardins sans limites » qui offre 23 créations paysagères à découvrir en Moselle, en Allemagne et au Luxembourg, à travers un florilège de joyaux végétaux qui se joue des frontières. En 2015, la Commission européenne a confirmé l’attribution du « Label du patrimoine européen » à la Maison de Robert Schuman. Ce label met en valeur le rôle essentiel d’un site dans la construction européenne et la diffusion des valeurs communautaires. Actuellement, seuls trois sites en France possèdent ce prestigieux label (l’Abbaye de Cluny, la Maison de Robert Schuman et le quartier européen de Strasbourg). Le site a également été labélisé « Maison des Illustres » en 2011, par le Ministère de la Culture et de la Communication.

Cette résidence d’un mois (de septembre à novembre) dédiée à la littérature contemporaine constitue un dispositif résidentiel mixte, « à projet » qui combine un projet littéraire mené par l’auteur en lien avec le territoire et un projet culturel émanant de l’institution. Grâce au soutien financier du Conseil général de la Moselle et à une subvention accordée par la DRAC assurant la rémunération de l’auteur, ce dispositif a pour objectifs de :

– Favoriser des rencontres avec divers auteurs/publics et société/université.
– Encourager la création littéraire en permettant à un auteur de développer un projet de création.
– Tisser des liens entre les différents acteurs du monde du livre et ceux d’autres disciplines artistiques, sur le territoire mosellan et participer ainsi au développement culturel de ce territoire grâce au partenariat mis en place (Maison de Robert Schuman, Université de Lorraine, Municipalité de Scy-Chazelles).
– Encourager l’écrivain et les publics à la création numérique via un blog résidentiel.
– Créer une structure innovante et encore peu diffusée sur le territoire français mêlant création littéraire contemporaine et recherche scientifique au sein de la région Grand Est.
– Lutter par la création de ce dispositif contre la précarité de l’écrivain en France, maillon économiquement le plus faible de la chaîne des différents professionnels du livre. La résidence d’auteurs en tant que dispositif culturel visant à donner les conditions et les moyens matériels à l’écrivain pour qu’il poursuive son travail de création sur un territoire, peut constituer un moyen de lutter contre cette réelle paupérisation. Ce dispositif, sorte d’ « Erasmus pour les écrivains » recommandé dans le dernier rapport de Frédéric Martel sur la condition de l’écrivain à l’âge numérique (2015) permettrait en Europe d’assurer une plus grande circulation des auteurs.

Le premier auteur accueilli est Jacques JOUET

Ecrivain polygraphe, il écrit des poèmes, chaque jour que les circonstances font (un poème par jour depuis le 1er avril 1992), mais aussi des pièces de théâtre, des romans, des nouvelles et des essais. Tout en pratiquant régulièrement la lecture en public de ses textes, il réalise des collages et des travaux typographiques et collabore avec des peintres. Depuis 1983, il est membre de l’Oulipo (Ouvroir de Littérature Potentielle fondé par François Le Lionnais et Raymond Queneau) et participe à l’émission radiophonique Des Papous dans la tête, sur France-Culture.

Durant sa résidence automnale à la Maison de Robert Schuman, Jacques Jouet mène un projet d’écriture intitulé « Littérature collective : Poèmes adressés, création transportée » qui vise à valoriser une forme poétique (le poème adressé) et une pratique artistique ouverte à tous, en lien avec une territorialité s’actualisant sous différentes formes (un musée, jardins…). Il s’agit d’une création collective, partagée avec les habitants de Scy-Chazelles, sous plusieurs formes (envoi postal, atelier d’écriture, soirée de lecture, blog résidentiel…) et en même temps transportée, c’est-à-dire une création faite au rythme des déambulations paysagères du poète dans le village, les vignes. En fait, une façon d’appréhender la spécificité d’un territoire mosellan selon l’auteur :

« Je compose quotidiennement des « poèmes adressés » qui sont expédiés par voie postale à des inconnus, des connaissances, des amis… Souvent ces poèmes témoignent d’une présence dans des lieux que je visite à l’occasion, dans lesquels je réside en permanence ou de façon temporaire. Ils sont, pour moi, une façon de découvrir activement un lieu. C’est une activité de création que j’aime partager avec des publics locaux : je vais adresser des poèmes à des habitants de Scy-Chazelles en leur parlant de leurs décors, mais j’ai aussi l’intention de les « embaucher » dans la composition de certains de ces poèmes à mes côtés. Travaux en ateliers ouverts, avec des étudiants, des élèves, des lecteurs de bibliothèque…Certains de ces poèmes seront « paysagers », à savoir qu’ils supposent un travail in situ, sur le motif, en promenade. Le fait qu’il y ait ce « Jardin des Plantes de Chez Nous » m’intéresse particulièrement. Ces poèmes déploieront plusieurs potentialités de formes empruntées aux traditions dans un esprit de renouvellement. Ils tiennent sur la page, sont imprimés sur papier. Ils sont aussi conçus et travaillés pour la lecture en public (« restitution » collective et, pourquoi pas in situ, en plein air, en promenade, dans le festival Cabanes…) ».

Un laboratoire hors les murs : Université/Cité

Dans le cadre de ce partenariat, il s’agit de créer une délocalisation de l’université de Lorraine et plus particulièrement du CREM, sous la forme d’une unité de recherche hors les murs dédiée à la résidence d’auteurs, la littérature contemporaine et européenne sur le site de la Maison de Robert Schuman. Il s’agit d’une forme institutionnellement inventive qui consiste à déplacer les activités, réflexions, en interaction directe avec des lieux urbains au cœur de l’environnement socio-économique et culturel afin de favoriser la création de passerelles entre le monde universitaire et la Cité, théorie et pratique. Ce lieu d’interaction offre à la ville une expérience innovante, une expertise sur le dispositif résidentiel, l’accueil des écrivains, les relations à nouer avec les publics, la politique culturelle à mener dans ce cadre, tout en soutenant la création littéraire en Moselle.

L’équipe Praxitèle « Arts, cultures et médiations » du CREM est une équipe scientifique tournée vers l’analyse de la création, de sa diffusion et de ses médiations et vers la compréhension des enjeux pratiques, institutionnels et symboliques qui s’y attachent. Le périmètre des recherches menées au sein de Praxitèle recouvre la création, dont les logiques sont saisies à travers la diversité de ses contextes (espace spécifique et autonome de production, relations institutionnelles, environnement économique et industriel) pour mieux en comprendre les enjeux formels et esthétiques et la réception. Une attention particulière est portée sur le caractère mouvant de ses frontières (art/industrie, création/médiation). Les objets d’étude relèvent notamment de l’art contemporain, de la littérature, de la bande dessinée, de la photographie. L’unité de recherche s’interroge aussi sur les institutions, considérées comme des instances de médiation et de prescription pratique et symbolique (représentations, comportements et pratiques, corpus, valeurs). Les musées et les lieux d’exposition, le patrimoine, les bibliothèques sont des terrains privilégiés des membres de l’équipe.

Dans le cadre de ce laboratoire hors les murs, le CREM mène, au sein de la Maison de Robert Schuman qui met à sa disposition des espaces, des recherches portant sur plusieurs domaines (la résidence d’auteurs, la littérature contemporaine européenne, la littérature numérique et la BD, les liens entre littérature et espaces : lieux et création, musée, patrimoine…).

RÉSIDENCE EN MILIEU RURAL ET NOMADISME

« LA PENSÉE SAUVAGE » (VOSGES)

Fondée en 2007 par Olivier Dautrey (ancien pensionnaire de la Comédie française), l’association La Pensée sauvage revendique l’accueil d’écrivains en campagne lorraine et la valorisation de la lecture et de l’écriture en milieu rural. L’objectif est de proposer aux auteurs une résidence de création à travers un espace nouveau, un dépaysement, une forme de déterritorialisation favorisant l’écriture et les rencontres.

Cette volonté renvoie à l’intitulé même de la résidence emprunté à l’ethnologue Claude Lévi-Strauss, à ce besoin de côtoyer le lointain, l’étranger afin de se découvrir.
Après avoir accueilli à demeure des auteurs avec le soutien du CNL, à Rochesson d’abord (Luc Tartar, Philippe Fenwick et Mathias Enard), puis dans le village vosgien de Bouxurulles, entre Charmes et Epinal (Sylvain Coher, Arnaud Friedman), le directeur de la résidence a souhaité répondre aux envies et besoins des écrivains concernant les lieux d’hébergement, en lien avec des partenaires régionaux, comme Antoine Mouton et Jacques Laurans, hébergés dans une abbaye cistercienne d’Ubexy ou Raphaël Krafft, logé dans un chalet forestier du Bitcherland en Moselle. Au gré des rencontres et des partenariats, la résidence évolue, devient nomade en délocalisant le dispositif sur des territoires différents en Lorraine.

De manière ponctuelle, l’association propose aussi des ateliers de lecture au sein de librairies ou de bibliothèques départementales en présentant textes et auteurs aux publics. D’autres interventions d’auteurs sont également menées par la mise en place d’ateliers d’écriture en milieu scolaire (Saint-Dié, Gérardmer, Mirecourt).

Missions de la Pensée sauvage

  • Placer l’écriture contemporaine au cœur des activités de la Pensée sauvage
  • Accueillir des auteurs en résidence
  • Proposer à un large public une offre variée de manifestations culturelles
  • Rendre intelligible l’existence de la résidence et le travail de l’auteur en résidence
  • Coordonner ses actions culturelles avec l’actualité et d’autres structures régionales (réseau BDP, musées, théâtres, écoles d’art, etc…)

Référence :

CLERC Adeline, 2014. « La résidence d’auteur ou comment s’inscrire dans un territoire rural. La Pensée Sauvage à Bouxurulles (Vosges) ». In : BISENIUS-PENIN, Carole (dir.), Résidence d’auteurs, création littéraire et médiations culturelles (1). A la recherche d’une cartographie. Nancy : PUN – Éditions Universitaires de Lorraine. 2014. p. 49‑60.

Résumé. – Cet article se propose d’étudier la seule résidence d’écriture conventionnée par le Centre national du livre (CNL) en Lorraine, la Pensée Sauvage implantée à Bouxurulles. Dans un premier temps, nous nous demanderons comment réinventer l’espace et le temps de l’écriture dans un milieu rural en nous appuyant notamment sur la réactivation d’une certaine imagerie auctoriale. Dans un second, nous pointerons la particularité du village de Bouxurulles et interrogerons l’avenir d’une résidence d’écriture mixte dans un espace rural.

Chambre étudiante et monde littéraire : pari osé du CROUS

Quel point commun entre une chambre cabine, le campus Lettres, la Résidence Boudonville du CROUS (centre régional des œuvres universitaires et scolaires) de Lorraine et un jeune écrivain ?

La création d’une résidence d’auteur au plus proche des jeunes.

Sous des formes variées et en l’espace de quelques années, les dispositifs résidentiels sont devenus un moyen de soutien à la création et à l’action culturelle sur le territoire lorrain.

En tant qu’outil de communication et de médiation permettant des transactions diverses entre écrivains, collectivités territoriales, opérateurs culturels et publics, la résidence offre ainsi un lieu pour demeurer, et peut-être même selon l’étymologie, de « garder la chambre ».

On peut y voir l’expérimentation originale d’« Une chambre à soi », comme une réminiscence de Virginia Woolf proposée par un établissement public en partenariat avec la Ville de Nancy et le festival Le Livre sur la Place. Pari osé ?

Le premier roman de Jérémy Fel. Editions Payot-Rivages

Une immersion en cité U

Pour la première fois, le CROUS de Lorraine héberge durant deux mois (janvier-février), un jeune auteur, une véritable plongée immersive pour Jérémy Fel.

Jérémy Fel. CROUS Lorraine

Primo-romancier, scénariste de courts-métrages, mais aussi libraire à Rouen, Jérémy Fel manie avec talent la camera obscura en livrant une œuvre qui réfléchit et explore le mal sous de multiples directions, angles d’optique.

Son roman Les Loups à leur portesalué par la critique est un kaléidoscope fictionnel addictif, une sorte de « grand puzzle feuilletonesque à l’atmosphère énigmatique et troublante entre Twin Peaks, Stephen King et Joyce Carol Oates » si l’on en croit l’éditeur, qui reflète sa passion pour la littérature américaine des grands espaces. La construction romanesque, entremêlant les chapitres comme autant de nouvelles indépendantes les unes des autres, offre une déambulation territoriale haletante du Kansas, à Annecy, en passant par la région nantaise ou l’Indiana.

Pour cette résidence, l’écrivain a donc exporté, délocalisé sa « chambre à soi » pour un studio en cité U. Si l’on se réfère au très bel essai de Michelle Perrot (Histoire de chambres, Paris, Le Seuil, 2009), on peut dire que ce dispositif culturel lui donne ainsi l’occasion de mettre en scène à la fois son espace personnel, son intimité créative et sa chambre ouverte alors conçue comme un « salon littéraire ».

En effet, cette résidence d’animation se décline, au contact des étudiants, sous la forme d’ateliers d’écriture, de sessions de lectures commentées et de conseils de libraire (« coups de cœur littéraires ») en itinérance dans les différents sites.

Pour l’auteur, il s’agit de lutter contre un cliché, celui du génie romantique, en montrant que la création repose sur la connaissance des œuvres des autres : « J’adore conseiller des livres, pour être écrivain, il faut être avant tout pour moi un lecteur ».

Cette médiation qui prend également la forme de l’atelier d’écriture est un moyen de rassurer les jeunes en appréhendant la littérature par le collectif. Pour Jérémy Fel, « L’atelier d’écriture de type creative writing est une approche très intéressante, mais encore mal vue en France, or elle me semble particulièrement nécessaire pour apprendre certaines techniques. L’intérêt repose aussi sur la possibilité offerte de voir comment une écriture littéraire se construit. L’idée de l’échange autour du texte paraît donc très formateur pour les étudiants ».

Un désir commun

Créer du lien, partager ensemble ses envies, ses tentatives textuelles, sa création relève d’un désir commun qui regroupe trois jours par semaine Jérémy Fel et des étudiants venus d’univers différents (gestion, lettres, informatique, médecine…) qui se sont engagés à produire une nouvelle à l’issue de la résidence.

Ce désir commun repose aussi sur un partenariat institutionnel associant le CROUS et la ville de Nancy par le biais du premier grand salon national de la rentrée littéraire. En fait, cette résidence est l’occasion de mieux saisir la politique culturelle du CROUS qui en tant qu’organisme public est essentiellement connu pour ses logements, sa restauration ou ses bourses.

Outre le soutien financier apporté à la réalisation de projets étudiants dans le domaine culturel, le réseau mène des actions avec pour objectif de « développer les pratiques artistiques amateurs » et de favoriser « l’émergence de nouveaux talents ». Ainsi, pour Jean-François Tritz, chargé du Pôle communication, culture et animations du CROUS Lorraine, « la résidence constitue un moyen de renouveler la dynamique culturelle, de faciliter l’accès à la littérature qui trouve tout son sens à Nancy, en lien avec le salon Le Livre sur la Place ».

Le salon,(Cette manifestation littéraire) dont les organisateurs militent depuis 1979 pour la promotion de la littérature, facilite la mise en relation entre le CROUS et les auteurs, notamment grâce à la médiation de Françoise Rossinot. En tant qu’opérateur et lieu de médiation littéraire, le salon(le festival), qui se définit comme une fête du livre accessible à tous partage ce désir de renforcer les relations entre jeunes auteurs et publics estudiantins.

Le Livre sur la Place se tient depuis 1978 à Nancy. Actualitté/Flickr, CC BY

Une culture de proximité

Pour les partenaires, il s’agit ainsi de mettre en place une culture de la proximité cherchant à élargir les représentations et à favoriser une expérience littéraire pouvant constituer un autre modèle d’intervention publique grâce à la résidence d’auteurs.

D’après Jean-François Tritz encore, cette culture de proximité passe par « une volonté d’apporter la littérature à la sortie de la chambre de l’étudiant », tandis que pour Françoise Rossinot, Commissaire générale du salon, « l’enjeu est d’avoir accès à la culture d’une autre manière, dans le rapport immédiat à l’écrivain ».

Ce partenariat s’inscrit d’ailleurs pour elle dans les objectifs du festival qui ne se limite pas au salon de septembre, mais qui propose durant toute l’année des rencontres avec les auteurs dans de multiples lieux (prison, écoles, maison de retraite, quartiers…).

Cette proximité souhaitée dans le cadre du dispositif résidentiel nous renvoie à l’analyse de Gisèle Sapiro sur la démocratisation culturelle et plus spécifiquement sur la nécessité de retisser des liens, « de créer les conditions d’une écoute réciproque, par-delà les hiérarchies sociales ».

Sans rentrer dans les débats actuels sur la place des jeunes dans la société française, on ne peut donc que se réjouir de la création d’une nouvelle résidence d’auteurs dans la région Grand Est, soucieuse de « l’émergence de nouveaux talents » qui reconnaît la jeunesse comme une véritable ressource pouvant participer et construire le monde (littéraire) de demain.

POEMA

Acteur associatif dans la région Grand Est, POEMA cherche à déployer sur le territoire les écritures poétiques contemporaines, en proposant depuis 2014 de multiples dispositifs à la croisée des arts et des genres (spectacle vivant, art contemporain, littérature…). Par le biais de nombreux partenariats (collectivités, associations, écoles…), il s’agit de d’offrir une approche de la poésie sous des formes variées (lectures-rencontres, performances, concerts, ateliers d’écriture et des actions ciblées jeune public).

Ainsi, en collaboration avec la Médiathèque de Meurthe-et-Moselle et dans le cadre du dispositif « Auteurs associés » (DRAC Alsace Champagne-Ardenne Lorraine / Conseil Régional Grand Est) une première résidence d’auteur de 2 mois, a été mise en place en 2016 permettant de mixer création et médiations sur divers sites (Jarny, Lunéville, Toul, Pont à Mousson). Le dispositif résidentiel a permis de recevoir de Rémi Checchetto, auteur d’une vingtaine de livres de poésie et de théâtre. Son projet met en scène les paysages de son enfance lorraine et permet notamment aux publics de découvrir les portraits-poèmes.

Résidences en lien avec l’univers du livre

Sur le territoire, certains dispositifs résidentiels peuvent être pérennes, d’autres davantage éphémères s’actualisant en fonction des lieux et des périodes.

Attardons-nous à présent sur un dispositif résidentiel spécifique récemment mis en place en Lorraine et constituant une aide complémentaire visant à soutenir la création littéraire.
En effet, le Conseil régional de Lorraine et la DRAC de Lorraine en partenariat avec le CNL (Centre National du Livre), ont initié, grâce à un Accord cadre pour le développement de la filière du livre en Lorraine (2015/2016), une nouvelle forme résidentielle, celle d’« auteur associé ». Le dispositif permet aux auteurs de bénéficier d’une rémunération à travers une résidence réalisée avec un acteur de la chaine du livre publics (bibliothèques, festivals…) ou privés (librairies, maisons d’édition), un lieu du territoire lorrain, sur une période de 4 à 8 mois.

bd2Résidence Librairie Carré des bulles, éditions du Goûteur Chauve, Metz (Moselle)

Librairie dédiée au graphisme et à la bande-dessinée hébergeant une maison d’édition associative Le Gouteur Chauve, ce lieu messin atypique a accueilli en résidence le jeune bédéiste Eric Chapuis autour d’un projet portant sur le roman graphique. Intitulé « Révolution des conseils de Metz », le travail de création, explorant les rapports entre récits fictionnels et documents factuels, s’est décliné autour d’une approche fictionnelle d’un événement historique messin survenu en novembre 1918, plus précisément une révolte (conseils de soldats et d’ouvriers en Alsace Lorraine). Il a également donné lieu à des échanges avec les publics in situ et dans la ville (collège, médiathèque).

Au Carré des Bulles, des résidences pour de jeunes dessinateurs Lorrains

Au deuxième étage de la librairie au Carré des Bulles de Metz, François Carré propose des résidences pour de jeunes artistes locaux. Le dispositif « auteur associé », créé en 2015 en partenariat avec la région Lorraine, la DRAC et le Centre National du Livre, permet d’apporter un coup de projecteur original sur un jeune dessinateur. Et aussi, de redécouvrir une librairie déjà bien ancrée.

Installé devant une table posée sur des tréteaux, penché sur son Mac, Charlie Zanello peaufine ses dessins. Il affine un trait par-ci, en ajoute un autre par-là. Son projet de roman graphique avance bien, le fruit de nombreuses heures passées dans cet atelier. Son « bureau », comme il l’appelle, est un grand open space situé au deuxième étage de la librairie au Carré des Bulles, à Metz, consacrée à la bande dessinée et aux arts graphiques. Depuis octobre, Charlie y fait une résidence d’artiste. Il a jusqu’au mois de mai 2017 pour travailler sur un projet original, en échange d’une subvention accordée par la région.

C’est grâce à François Carré, le propriétaire de la librairie, que le jeune dessinateur Lorrain a pu bénéficier de ce dispositif. Depuis son nouveau « bureau », on entend François conseiller quelques clients de la librairie, en bas. Béret sur la tête et lunettes rondes sur le nez, François Carré est un homme qui invite au partage et à l’échange, qu’il a toujours privilégié avec les clients.

Des Apéros Graphiques au dispositif « auteur associé »

Dès juillet 2008, quelques mois après l’ouverture de sa librairie, il lançait les Apéros Graphiques. Tous les vendredis soirs, de 18 heures à 20 heures, les dessinateurs en herbe et amateurs sont invités à dessiner autour d’un thème imposé. « Je voyais défiler beaucoup d’étudiants des Beaux Arts et des Arts Plastiques, je me suis dit que ce serait bien d’en profiter et d’en faire quelque chose », explique-t-il. Avec les Apéros Graphiques, François Carré découvre alors « différentes petites perles de la région », et les voient évoluer année après année. La plupart sont d’anciens étudiants de la région, et certains sont édités dans des revues, comme Fluide Glacial.

Pour lui, ces « petites perles » valent le coup d’être vues par un plus large public. Avec deux autres collègues, ils créent donc leur propre maison d’édition, Le Goûteur Chauve. Avec leur collection « Mise en Bouche », ils permettent ainsi à ces petits auteurs méconnus de s’essayer à une BD d’une vingtaine de pages, pour la montrer à un plus gros éditeur « et mettre le pied à l’étrier. »

Mais pour lui, ce n’est toujours pas assez. Le libraire veut davantage les aider, mais comment ? C’est alors qu’il repense à son atelier, au deuxième étage de la librairie, qui est inoccupé la plupart du temps. Pourquoi ne pas le mettre à la disposition d’un jeune auteur ? La résidence était née, grâce au dispositif « auteur associé ». Elle a pour objectif de soutenir la création par des bourses de résidences destinées aux auteurs s’associant avec une structure de la région Lorraine, sur une période de 4 à 8 mois.

 

 Le dispositif « auteur associé »

Une cohabitation enrichissante

Les candidats sont sélectionnés par un comité composé des membres de l’association le Goûteur Chauve, d’un représentant d’un distributeur de beaux-livres et de Yan Lindingre, rédacteur en chef de Fluide Glacial et dessinateur de la région. Avec son projet de montrer Metz sous 1918, c’est le dessinateur Eric Chapuis qui bénéficie du dispositif en premier, en octobre 2015. Charlie Zanello l’a depuis peu remplacé. Avec une subvention de 1 500 € par mois par la région et la Drac Lorraine, ils ont un accès illimité au deuxième étage de la librairie, pour travailler.

Présentation des résidents

« Le résident a les clés de la librairie, il peut venir quand il veut. C’est vraiment une opportunité pour lui de se plonger dans son travail », précise le libraire. En échange, le résident doit animer une fois par semaine des ateliers pédagogiques dans des établissements scolaires.

Interventions scolaires

De temps en temps, François monte voir son « colocataire ». Si cette cohabitation d’un nouveau genre lui permet de mieux faire connaître la librairie, elle lui apporte surtout la satisfaction de pouvoir aider un jeune auteur. « C’est plaisant de voir évoluer son projet. Pour le moment ce ne sont que des planches de dessins, mais nous savons qu’elles deviendront quelque chose. Il y aura bientôt des livres qui auront été créé au sein de ma librairie, c’est chouette », se réjouit le propriétaire.

Ce que ça rapporte

Juliette Redivo et Romane Mugnier

Résidence Festival les imaginales Epinal (Vosges)

Cette résidence s’adosse à l’un des plus grands festivals du livre de l’Est de la France, l’un des premiers salons internationaux de littérature d’imaginaire (fantasy, héroïque fiction, science-fiction, contes…) également connu pour mobiliser un public jeune. Durant 8 mois, l’auteur Charlotte Bousquet a pu travailler à l’élaboration de son roman en gestation, une « fantasy barbaro-mauresque », tout en participant à de nombreuses rencontres (école, collège, lycée, médiathèque, librairie, festival) de la Région Grand Est (Alsace, Champagne-Ardennes, Lorraine). Interrogée sur le dispositif, l’écrivaine souligne l’intérêt d’être implantée sur un territoire et d’être dégagée des obligations de la vie quotidienne grâce au soutien financier apporté :

Ce projet me permet d’écrire en étant rémunérée, dans un genre littéraire que j’apprécie et dont j’ai dû me détourner, au moins dans le domaine adulte, pour des raisons financières. Quand on vit de sa plume, il faut faire des choix… Le projet auteure associée me permet justement de mener à bien un projet ambitieux sans me préoccuper des contraintes habituelles auxquelles je suis soumise : c’est merveilleux !

Interactions transfrontalières : Lorraine/ Territoire Grande région

 Résidence itinérante
filet-rouge3

Printemps poétique transfrontalier

Cette résidence a été mise en place dans le cadre du festival de littérature « Printemps poétique transfrontalier » organisé en mars 2014 par diverses institutions littéraires de la Grande Région (les Amis de la Poésie, la Maison de la Poésie de Namur et le Centre culturel de la Kulturfabrik d’Esch-sur Alzette). Pendant dix jours, trois poétesses Danièle Corre (Lorraine), Véronique Daine (Wallonie) et Hélène Tyrtoff (Luxembourg) ont participé à une résidence itinérante déambulant ainsi de villes en villes sur trois territoires spécifiques (Lorraine, Belgique et Luxembourg). Le principe est que chaque auteur effectue une résidence sur le territoire de son voisin. Le dispositif résidentiel a été accompagné par de multiples médiations culturelles, sous la forme de rencontres publics/écrivains et d’ateliers d’écriture. La création littéraire à travers cette déambulation urbaine est envisagée sous l’angle de la diffusion culturelle, la littérature est comprise ici en termes de circulation des œuvres et de productions symboliques, esthétiques, ludiques. Avec le soutien de l’Espace Culturel Grande Région, la résidence conçue repose sur la promotion de la diversité et du dialogue interculturel au cœur de la Grande Région et en lien avec la participation des habitants (écoles, villes, quartiers). L’objectif énoncé est que chaque auteur explore « dans son texte le lieu de résidence qu’il occupe et l’importance du territoire dans lequel ce dernier est ancré ».

Auteurs et lieux (2014/2016)

Allemagne :

Alain Helissen au Saarländisches Künstlerhaus Saarbrücken,
Fabienne Jacob, Tom Nisse au Künstlerhaus Edenkoben en Rhénanie-Palatinat,

Belgique :

Norbert Lange aux Gîtes du Vieux Namur
Hans Arnfrid Astel aux Abattoirs de Bomel (Centre culturel de Namur) Wallonie

 Luxembourg :

Alain Dantinne au Centre culturel Kulturfabrik d’Esch-sur-Alzette,
Ann-Kathrin Ast au Centre Culturel Régional opderschmelz Dudelange

 Lorraine :

Lambert Schlechter à la Médiathèque de la Communauté d’Agglomération Sarreguemines Confluences (CASC) à Sarreguemines, Philippe Mathy au gîte de la Scance Verdun

Référence :
BISENIUS-PENIN, Carole, 2015. Médiations littéraires : Territoire et création au Luxembourg. In : VERCRUYSSE, Thomas (dir.), Luxembourg : ville créative. Luxembourg : capybarabooks. p. 32‑57.

 Résidence itinérante
filet-rouge3

Un bateau-atelier : PASSERELLES D’EUROPE

A l’initiative du comédien, ex-pensionnaire de la Comédie-Française et batelier Olivier Dautrey, la résidence d’auteurs « Passerelles d’Europe » offre à bord de la péniche L’Ange Gabriel une forme originale de navigation littéraire transfrontalière. Accueillir sur un bateau de fleuve des auteurs et des artistes, français ou étrangers, avec un projet d’écriture, telle est sa conviction.

Accompagné par Sarah Polacci, conseillère littéraire et Marie-Hélène Caroff, programmatrice du festival de littérature et journalisme « Le Livre à Metz » pendant 6 ans, puis à présent responsable de l’association Caranusca (la pierre et l’eau) spécialisée dans la création et l’accompagnement de projets culturels, cette nouvelle aventure itinérante a pour objectif d’expérimenter « l’univers ar­tisanal et sensible de la navigation » comme source d’inspiration, tout en offrant des rencontres publiques à bord et à terre lors d’escales, entre villes et campagnes, en lien avec des établissements culturels, scolaires, des festivals et des librairies afin d’élargir la palette culturelle sur le territoire Grand Est et des pays voisins (Belgique, Allemagne, Luxembourg). Il s’agit selon O. Dautrey de juxtaposer grâce à ce bateau-livre des réalités différentes propices à la création : « l’archaïsme du mode de transport, l’élément premier sur lequel on navigue, l’eau, et les modes de communication auxquels nous sommes habitués aujourd’hui. C’est donc une passerelle culturelle entre ces temps anciens et notre époque contemporaine que l’on convoque ».

L’écrivain Mathias Enard embarquait à bord de la péniche L’Ange Gabriel, en tant que premier invité d’une courte navigation test sur la Meuse, en octobre 2016 s’avère fasciné par « l’écriture en mouvement », cette lenteur permettant à l’imaginaire de se déployer.

Ainsi, reliant « la pierre » (valorisation des lieux patrimoniaux) et « l’eau » (résidence d’écrivains et d’artistes à bord de bateaux de fleuves), cette première déambulation fluviale, en collaboration avec Le Livre sur la Place de Nancy et La Foire du Livre de Francfort, va accueillir en résidence dès septembre 2017 l’écrivain Olivier Rolin, grand voyageur, dont l’œuvre est constituée notamment d’une vingtaine de romans (L’Invention du monde, Port-Soudan, Tigre en papier, Le Météorologue).

Au départ de Namur, en Belgique, un premier arrêt est prévu à Nancy, puis sur la Meuse, à Charleville-Mézières, avant de rejoindre Verdun et la bibliothèque bénédictine de Saint-Mihiel. Via Strasbourg, un autre arrêt de quelques jours à Francfort, à la Foire du Livre. Sur le Rhin, d’autres escales poétiques sont programmées (Mannheim, Karlsruhe ou Cologne), avant de regagner Namur en passant par la Hollande (Maastricht) et Liège (Belgique).

Une belle itinérance fluviale à découvrir.

https://www.facebook.com/associationcaranusca/

https://vimeo.com/211459856 (Teaser)

 Résidences fixes/pérennes
filet-rouge3

Résidences d’auteurs en RHENANIE-PALATINAT (Allemagne)

Künstlerhaus (Maison des artistes) Edenkoben 

Depuis 1987, la résidence de la Maison des artistes cherche à promouvoir les rencontres entre poètes, écrivains, artistes, musiciens et traducteurs. Dans ce cadre, le but est de transcender les frontières tant au niveau géographique qu’au niveau des contenus en privilégiant la littérature contemporaine et la poésie en lien avec un public visé : lecteurs, amateurs d’art, représentants d’associations littéraires et amateurs du sud de la Rhénanie-Palatinat. Le nombre de bénéficiaires est limité à 4 à 5 artistes et écrivains à la fois, soit 10 maximum par an invités par le ministère de la Culture de Rhénanie-Palatinat. De plus, depuis 2005, dans le cadre d’une résidence croisée entre un écrivain résidant en Bourgogne et un écrivain résidant en Rhénanie-Palatinat, le Conseil régional de Bourgogne, en partenariat avec le Centre régional du livre de Bourgogne, le ministère de la Culture du Land de Rhénanie-Palatinat (Allemagne), la Maison Jules Roy à Vézelay, la Maison Rhénanie-Palatinat à Dijon et le Centre artistique d’Edenkoben, propose à un écrivain résidant en Bourgogne une résidence d’un mois, au centre artistique d’Edenkoben en Rhénanie-Palatinat.


Référence :
filet-rouge3
Lacheny, Marc et muller, Suzanne, 2016. La maison d’artistes d’Edenkoben en Allemagne : réception, médiation, créationIn : BISENIUS-PENIN, Carole (dir.), Résidence d’auteurs, création littéraire et médiations culturelles. Vol. 2 : Territoires et publics. Nancy : PUN – Éditions Universitaires de Lorraine. p. 133‑146.

Résumé. – À partir du cas particulier de la « maison d’artistes » (Künstlerhaus) d’Edenkoben en Allemagne, le présent article propose une interrogation sur le mode de fonctionnement de cette institution, sur le recrutement et l’accueil des artistes (auteurs, traducteurs, artistes plasticiens), sur l’articulation entre création et médiation auprès du public. Concernant la littérature, une attention toute particulière est ici accordée au vaste projet de traduction « Poésie des voisins » (Poesie der Nachbarn). Pour ce qui est des arts plastiques, l’examen des œuvres de Marion Kreissler, de Denis Serre et de Marko Schiefelbein montre comment la maison d’artistes d’Edenkoben se transforme en maison des arts, reflet de la réalité artistique elle-même. L’enquête conduit, enfin, à une tentative de cartographie des maisons d’artistes et des résidences d’auteurs en Allemagne, qu’il conviendra d’affiner par des recherches ultérieures et d’élargir à l’aire germanophone (Autriche, Liechtenstein, Luxembourg, Suisse, Belgique ).

de2

Bourse d’écrivain public (Stadtschreiber) de la ville de Trèves 

Cette résidence accueille depuis 2007 pendant environ 6 mois un écrivain en langue allemande de littérature contemporaine ou de jeunesse ayant comme contrainte résidentielle l’observation et la description de la vie à Trèves. Les productions attendues : discussions avec la population de la ville, organisation d’ateliers d’écriture et lecture d’œuvres rédigées sous la plume de l’auteur (publications d’un résumé en fin de mandat).

Référence :
filet-rouge3
Deshoulières, Valérie, 2014. Être écrivain en résidence à Trèves (Allemagne) : création artistique ou industrie culturelle ? Zwangsgeranisierung. Les « sublimes paroles et idioties » de Frank P. Meyer. In : BISENIUS-PENIN, Carole (dir.), Résidence d’auteurs, création littéraire et médiations culturelles (1). A la recherche d’une cartographie. Nancy : PUN – Éditions Universitaires de Lorraine. 2014. p. 39‑48.

Résumé. – Depuis 2007, la ville de Trèves (Allemagne) propose une résidence d’écrivains. Sa particularité est d’être en partie soutenue par l’Évêché. Nous avons rencontré le dernier récipiendaire de cette bourse de six mois, Frank P. Meyer, dont les récits brefs écrits durant cette résidence ont été publiés en 2013 sous un titre qui méritait examen : Zwangsgeranisierung, que nous traduirions volontiers par « Corvée de géraniums ». De l’obligation florale à la contrainte d’écriture, il n’y a qu’un pas que tout Oulipien franchira aisément. En jouant l’idiot du village, Frank P. Meyer déjoue habilement le piège d’une telle sinécure : valoriser la ville qui l’accueille aux dépens de son art.

Résidences d’auteurs en WALLONIE (Belgique)

Résidence Passa Porta Bruxelles 

La Maison internationale des littératures à Bruxelles (Passa Porta) invite des écrivains étrangers à séjourner en résidence dans la maison des littératures ou dans la campagne flamande pour une durée de 2 à 8 semaines depuis 2004. L’occasion leur est ainsi donnée de travailler sur un manuscrit et de découvrir la culture et la littérature belge et flamande. Il s’agit d’intensifier les échanges littéraires entre écrivains, lecteurs et le secteur professionnel, tant en Belgique qu’avec l’étranger et de stimuler la création littéraire en offrant aux écrivains et aux traducteurs l’environnement inspirant d’une maison des littératures conçue comme un projet dynamique et innovateur.

Référence :
Bisenius-Penin, Carole, 2015. La Maison internationale des littératures à Bruxelles : la résidence comme une interface communicationnelle entre des œuvres littéraires, des publics et des institutions culturelles. In : Bisenius-Penin, Carole (dir.), Résidence d’auteurs, création littéraire et médiations culturelles. Vol. 1 : À la recherche d’une cartographie. Nancy : PUN – Éditions Universitaires de Lorraine. p. 117‑130.

Résumé. – Cet article vise grâce à une approche transdisciplinaire, à penser le concept de résidence d’auteurs comme une interface communicationnelle entre des œuvres littéraires, des publics et des institutions culturelles. Cette étude de la résidence belge Passa Porta (Maison des littératures, Bruxelles) tente d’explorer le rapport littérature société en recherchant les critères définitoires de ce modèle résidentiel résolument interculturel, tout en saisissant les enjeux de cette approche différente de la littérature qui inclut l’écrivain et la création au centre de son dispositif. Ainsi, cette résidence apparaît comme une mise en scène auctoriale de l’écrivain et comme un espace d’expérimentation littéraire en lien avec le territoire. Lieu de vie littéraire, de création et de culture, cette résidence dynamique et multiculturelle s’avère un sérieux atout en tant que laboratoire expérimental pour la littérature contemporaine et pour les politiques culturelles de la Grande Région.

Résidence de Mariemont Morlanwelz

regardsced-wb.be

 La Communauté française de Belgique a confié au Centre des Ecritures Dramatiques Wallonie-Bruxelles, la gestion culturelle d’une résidence d’écriture théâtrale, en partenariat avec le Musée royal de Mariemont en 2008. Ce lieu, entre Charleroi et Mons, est destiné principalement à accueillir un auteur dramatique (belge ou étranger) pour une durée de 2 à 8 semaines dans les conditions de semi-retraite offertes par ce cadre remarquable. Cette résidence a pour principaux objectifs: l’aide aux auteurs dans la gestation de leurs œuvres et la diffusion et la promotion de celles-ci dans le monde théâtral et littéraire en Belgique et à l’étranger.

Référence :

Oriol-Boyer, Claudette, 2014. Mariemont, une résidence théâtrale de création. In : Bisenius-Penin, Carole (dir.), Résidence d’auteurs, création littéraire et médiations culturelles. Vol. 1 : À la recherche d’une cartographie. Nancy : PUN – Éditions Universitaires de Lorraine. p. 107-116.

Résumé. – La résidence de Mariemont (Belgique) est issue du Centre des écritures dramatiques de Wallonie-Bruxelles et lui demeure étroitement liée. Elle est centrée sur l’écriture de textes dramatiques contemporains. Depuis avril 2009, un ou plusieurs auteurs de théâtre l’occupent successivement. Chaque auteur réside seul et peut, s’il en éprouve le besoin, se faire accompagner par un comédien ou par un metteur en scène, la disposition du lieu permettant la cohabitation de deux personnes. Le Centre des écritures dramatiques veut avant tout donner du temps d’écriture aux auteurs, apporter une aide à la production des textes (des parrains accompagnent le résident dans son écriture), favoriser les mixages culturels. Dans le temps de la résidence, l’auteur ne reçoit aucune rémunération et a très peu d’activités orientées vers la médiation culturelle. Ce n’est pas une résidence de consécration. C’est une résidence de création avant tout.

 

Résidence pour écrivains et poètes à la Maison de la poésie d’Amay

baleine

En 2006, la résidence d’auteurs recevait la reconnaissance officielle du Ministère de la Culture de la Communauté française de Belgique (devenu Fédération Wallonie-Bruxelles). La vocation de la résidence (3 à 6 semaines) est de construire un lieu de qualité, un relais pour la parole poétique, un espace sans frontières où il est possible d’établir des liens durables entre des poètes non seulement de langue française mais aussi d’autres langues et d’autres cultures. Outre une soirée de lecture sur place ou dans d’autres lieux en Belgique l’auteur en résidence s’engage à produire et fournir un texte qui pourra être repris dans la collection « Résidence » des éditions de L’Arbre à Paroles.

Références :
Lévy, Clara, 2014. La Maison de la Poésie, une résidence tout en souplesse. In : Bisenius-Penin, Carole (dir.), Résidence d’auteurs, création littéraire et médiations culturelles. Vol. 1 : À la recherche d’une cartographie. Nancy : PUN – Éditions Universitaires de Lorraine. p. 97‑106.

Résumé. – Ce texte porte sur la résidence d’auteurs liée à la Maison de la Poésie, située à Amay, en Belgique. Il établit, en examinant successivement l’ensemble des critères dont on convient qu’ils définissent habituellement une résidence d’auteurs, que la Maison de la Poésie en constitue bien une. Mais cette résidence fonctionne sur un mode inhabituellement souple où presque tout est discutable et négociable avec le poète reçu en résidence.

Vandeninden, Elise, 2016. Le versus de la médiation : les représentations du public dans les résidences d’auteurs belges. In : Bisenius-Penin, Carole (dir.), Résidence d’auteurs, création littéraire et médiations culturelles. Vol. 2 : Territoires et publics. Nancy : PUN – Éditions Universitaires de Lorraine. p. 181-192.

Résumé. – Aborder les résidences d’auteurs sous le prisme de la médiation culturelle implique de mener une réflexion au sujet de ses publics et des actions réalisées à leur destination. L’originalité de notre travail sera de proposer une réflexion sur les publics des résidences en travaillant non pas sur la réception des dispositifs mais sur leurs conceptions. Il s’agira plus précisément d’aborder ce que Bernadette Dufrêne et Michèle Gellereau appellent le « versus des actions » de médiation qui, en interrogeant les intentions qui président à la réalisation des manifestations, fait apparaître leur dimension « politique ». Celle-ci sera analysée au travers des entretiens qualitatifs menés avec les responsables de trois résidences d’auteurs belges (Amay, Passa Porta et Pont d’Oye). L’intérêt de cette approche comparative permettra de mettre au jour les différentes conceptions des publics, de la culture mais aussi des rôles et des missions dont se dotent les institutions culturelles étudiées.

 Résidence d’auteurs au Luxembourg

Résidence Struwwelpippi (Echternach) 

livre-enfant1Il s’agit d’une résidence d’auteurs germanophones de livres pour enfants et pour la jeunesse, la seule en Europe à se spécialiser dans ce domaine. Depuis 2002, elle est organisée par le Centre national de littérature et la Ville d’Echternach en collaboration avec le Ministère de la Culture, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche – Luxembourg. Le nom de la résidence d’auteurs Struwwelpippi a son origine dans une conférence sur la littérature pour enfants et pour la jeunesse lors d’une séance de formation continue pour instituteurs. Il s’agit de la contraction des titres de deux grands classiques de la littérature enfantine allemande Struwwelpeter (Pierre l’Ébouriffé) de Heinrich Hoffmann et Pippi Langstrumpf (Fifi Brindacier) d’Astrid Lindgren. Ce personnage fictif vient à la « Springprozession » (Procession dansante d’Echternach), manifestation traditionnelle religieuse et culturelle, organisée le mardi de Pentecôte, patrimoine culturel immatériel de l’UNESCO. Un des buts de la résidence est d’amener les enfants très jeunes à la lecture et au plaisir de lire, les auteurs devront donc s’exprimer dans la langue que les enfants maîtrisent en premier.

Référence :
Glesener, Jeanne E., 2014. Défis et enjeux de la résidence d’auteur jeunes publics :
Struwwelpippi dans le contexte luxembourgeois. In : Bisenius-Penin, Carole (dir.), Résidence d’auteurs, création littéraire et médiations culturelles. Vol. 1 : À la recherche d’une cartographie. Nancy : PUN – Éditions Universitaires de Lorraine. p. 131‑144.

Résumé. – Cet article présente la résidence d’auteur Struwwelpippi kommt zur Springprozession organisée en collaboration entre le ministère de la Culture du Grand-Duché de Luxembourg, le Centre national de littérature et la Ville d’Echternach. Concevant le dispositif de la résidence d’auteur comme un moyen pour promouvoir le transfert culturel entre territoires, le concept et l’organisation de cette résidence seront présentés en détail. L’accent sera mis sur son inscription géoculturelle tant au niveau du concept que des retombées. L’article soutiendra que le dispositif de la résidence d’auteur s’avère être un moyen propice pour contribuer à la diffusion de la culture de petits pays.

APPROCHE COMPARÉE : TERRITOIRE QUÉBÉCOIS

Au sein de l’espace francophone, le Québec possède sur son territoire, outre les grandes villes (Québec, Montréal…) de nombreux sites résidentiels en région (Laurentides, Outaouais, Nunavik…). La politique culturelle du Québec, à travers notamment la création en 1994 du Conseil des arts et des lettres, a favorisé le développement des résidences, au plan local, mais aussi international grâce à de nombreux partenariats (Argentine, Belgique, France, Haïti, Japon, Mexique…) visant à mettre en place des dispositifs résidentiels croisés, à privilégier la création et l’expérimentation littéraire en lien avec les populations.

A partir d’une typologie des résidences en cours de construction, l’objectif est ici d’effectuer un focus, une sélection de sites résidentiels afin de saisir leurs diversités.

VILLE DE QUEBEC

Québec : La Maison de la littérature

 La « Maison de la littérature » est un lieu innovant fondé sur la recherche d’un accompagnement offre aux auteurs, aux professionnels du livre et aux publics, un espace de mutualisation et de ressources, tout en participant au renouvellement du maillage territorial, via le soutien à l’initiative littéraire (création et expérimentations).
Construite à partir d’un édifice patrimonial abandonné dans le quartier du Vieux-Québec (l’ancien temple Wesley), la Maison dépend d’une institution littéraire prestigieuse (l’Institut Canadien de Québec), organisme culturel privé à but non lucratif fondé en 1848, administrant le réseau de la Bibliothèque de Québec et ayant notamment comme objectifs  :
« Enrichir la vie culturelle des citoyens et faire de Québec une ville littéraire créative qui rayonne au Québec, dans la francophonie et dans le monde ».
« promouvoir et rendre accessibles le savoir et la culture en offrant des services de bibliothèque, de médiation et de diffusion culturelle et littéraire institutcanadien.qc.ca. Dans le cadre de ce projet initié en 2007, la ville et le ministère de la Culture se sont engagés à repositionner les écrivains au cœur de l’univers urbain grâce à la création de ce lieu qui s’avère particulièrement pertinent dans la mesure où il cherche à articuler :

  • les divers champs de la littérature, à la fois la création (« résidences d’auteurs, cabinets d’écriture, studio de création, atelier de bande dessinée et d’illustration… »),
  • la diffusion (« bibliothèque publique, salon de lecture, espace web, expositions, bureaux pour les organismes littéraires »),
  • les médiations culturelles (« bistro littéraire, spectacles littéraires, des performances, des rencontres d’auteur »),
  • sans oublier la formation (« les jeunes de la relève littéraire pourront y rencontrer leur mentor, obtenir du soutien et de la formation et présenter au public le résultat de leur travail »).

La Maison propose ainsi à Québec plusieurs programmes résidentiels.

Résidences croisées : ouverture internationale

Résidence d’écriture Québec-Paris

Dans le cadre d’un accord de coopération entre les villes de Québec et de Paris en vue de développer les initiatives permettant l’expression des écrivains des deux villes, ainsi que la promotion de la littérature francophone auprès du public, est née cette résidence croisée. Chaque année, pour un séjour de 3 mois, autour d’un projet d’écriture (roman, nouvelle, essai littéraire, poésie, conte, écriture dramatique), un auteur parisien est reçu à Québec et un auteur québécois est accueilli en résidence dans les ateliers de la ville de Paris, à la Cité internationale des Arts
Dans ce cadre, par exemple l’écrivaine Fabienne Jacob, née en Lorraine, a été reçu à Québec en 2011.

Résidence de création Québec-Bordeaux

conte2

En 2007, dans le cadre de la coopération entre l’Aquitaine et le Québec, l’agence culturelle du Conseil régional Écla (Ecrit Cinéma Livre Audiovisuel en Aquitaine) et l’Institut Canadien de Québec, gestionnaire de bibliothèques publiques, se sont associés pour mettre en place un échange résidentiel d’une durée de deux mois chaque année. L’originalité de cette résidence croisée porte sur l’alternance littéraire, puisque les années impaires sont dédiées à la bande dessinée et les années paires à la littérature jeunesse. L’auteur-résident est invité à participer à quelques rencontres professionnelles et/ou publiques (en librairie, bibliothèque, festival de bande dessinée, salon du livre ou milieu scolaire).

Dans ce cadre, par exemple la bédéiste Laureline Mattiussi, née en Lorraine, a été reçu à Québec en 2009.

Résidence d’écrivains en collaboration avec le Centre québécois de P.E.N. international

Depuis 2006, en collaboration avec le Centre québécois du P.E.N. et la Ville de Québec,  les écrivains en exil au Canada, bénéficient d’une résidence de trois mois à la Maison de la littérature. L’acronyme « P.E.N. » renvoie au mot anglais « plume », dont les trois lettres représentent également les mots poets, essayists, novelists (poètes, essayistes, nouvellistes – romanciers). Il s’agit d’un organisme d’écrivains (poètes, romanciers, essayistes, auteurs dramatiques, critiques, traducteurs, journalistes) fondé à Londres (1921) qui fait la promotion de l’importance de la littérature et qui défend la liberté d’expression partout dans le monde à travers plus de 100 pays :
« La littérature, quelle que soit son origine nationale, ne connaît pas de frontières et devrait rester une valeur commune aux nations en dépit des bouleversements politiques et internationaux. »

Cette résidence s’articule autour d’un double objectif :
• aider les écrivains en exil à reprendre leur pratique et leurs activités professionnelles au Canada.
• aider les écrivains préoccupés par la liberté d’expression à poursuivre leur travail lié à cette question. La résidence permet d’établir des partenariats avec des institutions d’enseignement, des bibliothèques et la communauté littéraire de la ville d’accueil.

penquebec.org/pen-international

Dans ce cadre, par exemple l’auteur et journaliste algérien Aziz Farès a été reçu à Québec en 2015.

Résidence pour la relève québécoise

Sous cet intitulé, il est possible de découvrir un dispositif créatif et citoyen innovant, une résidence dédiée à des auteurs en début de carrière afin d’obtenir un soutien pour la réalisation d’un projet de création, de « soutenir la relève artistique du Québec ». La résidence constitue un outil pertinent dans le cadre de la politique culturelle menée par le biais du programme Première Ovation (Un tremplin pour la relève)

« Implantée en 2008 par la Ville de Québec, la mesure Première Ovation vise à soutenir les débuts artistiques des jeunes talents en leur donnant les moyens de créer et de vivre leurs premières expériences professionnelles. Lors de Québec horizon culture, en 2009, le ministère de la Culture et des Communications s’est associé à la Ville de Québec pour soutenir Première Ovation par l’entremise de l’Entente de développement culturel. À cette occasion, de nouvelles disciplines se sont ajoutées à la musique et au théâtre, soit la danse, les arts littéraires, les arts visuels, les arts médiatiques et les métiers d’art. En 2012, Première Ovation a ajouté les arts multi et, en 2015, le cirque et le patrimoine ».

L’objectif est de faciliter « l’insertion de la relève littéraire dans le milieu professionnel », tout en favorisant une certaine visibilité à l’auteur. Cette aide résidentielle concerne les jeunes écrivains (entre 18 et 35 ans) résidant sur le territoire de la ville de Québec et se décline sous 2 formes au sein de la Maison de la littérature :
• une résidence d’écriture classique
• une résidence de création en arts littéraires (production de formes hors du livre) dont la réalisation se déroule en résidence dans le studio de création de la Maison de la littérature
– spectacles littéraires, performances, vidéo-poèmes, radio-romans, adaptations pour la scène ou le web, improvisations BD, installations, interventions dans l’espace public, expérimentations multimédias…).

Dans ce cadre, par exemple l’auteure dramatique Valérie Boutin a obtenu une résidence d’écriture en 2015.

VILLE DE MONTREAL

Ecrivains en résidences au cœur des espaces urbains

Théâtres, universités mais aussi bibliothèques, librairies, écoles, quartiers, la résidence d’auteurs à Montréal bouillonne au sein de l’espace public et incite les habitants à la création littéraire. Elle bénéficie également de divers programmes du Conseil des arts de Montréal comme « Écrivains en résidence » créé en 2007 dans le but de permettre à des écrivains de prendre contact avec leur public en mettant en place un projet littéraire avec les gens de la communauté, tout en poursuivant leur propre travail de création. Il s’agit  de favoriser la diversité des formes d’expression littéraire et des formes de participation à la vie culturelle en interaction avec de nombreuses institutions de la ville.

Résidences en bibliothèque

artsmontreal.org/fr/programmes/ecrivains-en-residence
https://www.uneq.qc.ca
http://www.banq.qc.ca/activites

Ce dispositif résidentiel mené, en collaboration avec le Conseil des arts de Montréal (CAM), la Direction des bibliothèques de Montréal et l’Union des écrivaines et des écrivains québécois (UNEQ) s’adresse aux écrivains du territoire de l’île de Montréal. Les auteurs retenus dans les bibliothèques de divers quartiers doivent effectuer durant plusieurs mois un travail de création et un projet de médiation culturelle s’adressant à la population des arrondissements concernés. L’écrivain n’est pas là pour animer le lieu, mais pour l’occuper, l’habiter de manière ponctuelle en réalisant une œuvre (projet de création) qui puisse se nourrir des rencontres réalisées sur place (projet de médiation avec les visiteurs). L’idée est de valoriser la littérature contemporaine en instituant une résidence d’auteur au sein de la bibliothèque.
Par exemple, de septembre 2015 à juin 2016, la Grande Bibliothèque de Montréal a reçu en résidence l’écrivain Gilbert Turp qui a décidé d’écrire le « Journal intime de la Grande Bibliothèque » mêlant expérimentation littéraire, portraits et écriture diariste. Sorte de « mouvement perpétuel de l’écriture de soi, centré sur le présent », selon Philippe Lejeune (« Le journal comme « antifiction » », Poétique 1/2007 (n° 149), p. 3-14 URL : cairn.info/revue-poetique), le journal s’élabore in progress sur la ligne de la chronologie référentielle et donne à lire l’itinéraire de cette aventure intérieure sous une forme numérique disponible en ligne
Pour Gilbert Turp, l’intérêt résidentiel réside dans cette interaction possible avec la bibliothèque, le goût de l’inattendu, des rencontres qui peuvent nourrir le travail personnel de l’écrivain, comme il l’explique ici :

lafabriqueculturelle.tv

Résidences en librairie

librairie

 Tentant de dépasser la tension habituelle entre commerce et culture, l’Association des libraires du Québec (ALQ) en partenariat avec le Conseil des arts de Montréal (CAM) a cherché, dès 2013 avec une expérience menée à la librairie Le Port de tête à diffuser un modèle résidentiel au sein de cet espace public. Les libraires se positionnent ici comme des « passeurs culturels ». Ce dispositif repose sur la volonté de « familiariser le public avec le travail de l’écrivain », comme le souligne Nathalie Maillé, Directrice générale du Conseil des arts de Montréal :
« Avec cette résidence, nous souhaitons favoriser les rencontres entre les créateurs et leurs lecteurs, tout en offrant un lieu stimulant qui fera rayonner le talent d’un écrivain montréalais dans différents quartiers de la ville. Ces rencontres favoriseront les discussions et feront connaître un peu mieux la réalité du travail d’écriture qui se fait, très souvent, dans la solitude. »
Par rapport aux objectifs culturels retenus, il s’agit de faire connaître des auteurs contemporains, de démystifier le processus de création littéraire, tout en montrant le côté artisanal de l’écriture qui se nourrit elle-même de multiples lectures. Ainsi, chaque résidence en librairie accueille un auteur qui s’inspire d’une citation d’une œuvre (Villes invisibles d’Italo Calvino, Les Vagues de Virginia Woolf…) qui sert d’élément déclencheur à son projet de création et de médiation. .
En 2016 par exemple, durant 4 mois (février-mai) l’écrivaine Élise Desaulniers en résidence à la librairie Zone libre, propose aux résidentes des Habitations Jeanne-Mance de s’initier à l’écriture de l’essai, à des textes d’opinion, par le biais de rencontres et de discussions dans la librairie. Ce projet renvoie à la fonction même de ce lieu et de l’écrivain au cœur de la cité, comme on peut le noter à travers les propos de Mireille Frenette, la propriétaire de la librairie :

« La vision féministe d’Élise Desaulniers et son intention de donner la parole aux femmes des Habitations Jeanne-Mance, nos voisines, rejoignent notre volonté maintes fois manifestée, de nous inscrire dans notre quartier comme un lieu d’échange et de réflexions citoyennes. »

Résidences à l’école

communication-jeunesse.qc.ca

Un programme intitulé « Une école montréalaise pour tous » réunit plusieurs institutions et organismes (Conseil des arts, Ministère de l’éducation, Communication-Jeunesse) afin de favoriser la mise en place de résidences d’auteur en milieu scolaire à Montréal. L’objectif central est de permettre à un écrivain jeunesse durant plusieurs mois de mener un projet de création et de médiation culturelle développé autour de la thématique choisie par l’école participante. Le but est également de familiariser le personnel enseignant et les élèves avec le processus de création littéraire.
Dans le cadre de ce dispositif, en janvier 2015, André Marois, auteur de romans policiers et de science-fiction notamment, a bénéficié durant 3 mois, d’une résidence à l’école primaire Montcalm. Cette résidence de type mission, s’articule autour d’un projet littéraire à dimension mémoriale destiné à amener les enfants à produire collectivement une histoire en lien avec leur territoire (quartier de Villeray-St-Michel-Parc Extension) sur une période définie (les 50 dernières années) et en lien avec des témoignages insérés à la fiction. La présence de l’écrivain spécialiste du polar offre ainsi la possibilité d’expérimenter la relation littérature et réalité, le traitement des faits divers ou encore le travail sur les archives comme l’explicite André Marois :
« Ma résidence continue à l’école Montcalm. J’ai commencé par la recherche d’informations et de documents – pas toujours facile pour le quartier St-Michel – mais j’ai pu visiter les archives du Journal de St-Michel et la bibliothèque de St-Michel qui fut aussi une bonne source. La cueillette des témoignages et la visite de témoins généreux et précieux ont allumé les élèves qui ont pu choisir le thème de leur histoire. Ils ont fini aujourd’hui leur plan et l’écriture commencera la semaine prochaine. Nous aurons donc 24 histoires qui couvrent les 50 dernières années. Ce sera très varié et intéressant, parfois drôle, parfois non. Les élèves sont très motivés et moi avec. À suivre, encore ».

ecole2
Cette forme de résidence s’apparente à une résidence « d’animation » ou encore « résidence-mission » organisée souvent à des fins d’éducation artistique et culturelle, en faveur d’un public spécifique, qui s’appuie sur des formes d’intervention ou d’actions très variées et qui ne prévoit pas ou très peu de temps pour le travail d’écriture de l’auteur. L’auteur-résident doit s’engager dans une démarche éducative donnant à voir et à comprendre les processus de création qu’il met en oeuvre (réflexion, expérimentation, réalisation).

Une résidence mobile en camionnette à Montréal

Le Conseil des arts de Montréal et le Laboratoire sur les récits du soi mobile (LRSM) de l’Université de Montréal ont mis en place en 2016 une résidence mobile originale permettant à un auteur de déambuler dans la ville grâce à une camionnette pourvue d’outils de captation audiovisuels. L’objectif ici est de saisir les enjeux de l’espace (urbain, imaginaire, identitaire, interculturel…) par le biais d’un dispositif résidentiel nomade, au gré des routes et des ruelles, offrant à l’écrivain la possibilité de confronter son processus de création au territoire.

Crée en 2012, en collaboration avec l’Université de Montréal et la Fondation canadienne pour l’innovation, le laboratoire est une infrastructure universitaire spécifique composée d’une unité mobile de haute technologie comprenant aussi un studio d’écriture visuelle et qui accueille les chercheurs de différentes disciplines des sciences humaines et sociales. Il se veut un lieu de convergence médiatique et culturel où des chercheurs et partenaires travaillent avec des outils de captation audiovisuels en fonction des terrains à explorer, en somme un regard sur les notions de trajectoire, de mobilité et de récit, au cœur banlieues montréalaises.

Né d’un père libyen et d’une mère québécoise, Ralph Elawani, auteur et journaliste, a élaboré pour cette première résidence un projet de création intitulé « Surface de réparation : comprendre la géopoétique du Petit-Maghreb par le football ». Dans ce quartier, rue Jean-Talon entre Pie-IX et Saint-Michel, l’écrivain a recueilli les propos des habitants avec l’envie de réaliser une œuvre littéraire interactive se nourrissant de la quotidienneté, des rencontres en fonction des déplacements, des lieux.

Sources :

https://www.artsmontreal.org/fr/residence/soi.mobile
http://www.lrsm.ca

Références :
Caron Jean-François (2008). « L’invitation au voyage : résidences pour auteurs et traducteurs à l’étranger ». Québec : Lettres québécoises, la revue de l’actualité littéraire, n° 130, p. 15-18.

erudit.org/culture

Gilbert Bernard, 2016. « La Maison de la littérature de Québec et son programme de résidences ». In : BISENIUS-PENIN, Carole (dir.), Résidence d’auteurs, création littéraire et médiations culturelles. Vol. 2 : Territoires et publics. Nancy : PUN – Éditions Universitaires de Lorraine. p. 109-120.

Résumé. – Inaugurée en octobre 2015, la Maison de la littérature occupe un édifice patrimonial situé au cœur du Vieux-Québec. Après une transformation majeure, la plus ancienne bibliothèque de Québec, qui abritait aussi une salle de spectacle, est devenue un dispositif novateur voué à la littérature. Sur une superficie de 2 500 m2, on y trouve une bibliothèque publique et une exposition permanente consacrées à la littérature québécoise, une scène littéraire, une résidence pour écrivains et des espaces de création (studio, atelier BD, cabinets). Chaque année, la programmation comprend quelques centaines d’activités, dont le festival Québec en toutes lettres. La Maison de la littérature offre un programme varié de résidences, qui sont réservées autant à l’écriture qu’à la création en arts littéraires. Ces résidences, avec la scène littéraire et le festival, permettent d’offrir à la communauté littéraire de Québec et d’ailleurs des opportunités fréquentes de création, de production et de diffusion publique.

Grognet Hélène, 2002. « Les bibliothèques, les écrivains et leurs publics ». Lyon : Bulletin des bibliothèques de France (BBF), n° 6, p. 29-34. Disponible en ligne : bbf.enssib.fr

Le Marec Joëlle, 2006. « Les musées et bibliothèques comme espaces culturels de formation », Savoirs 2 (n° 11), p. 9-38. Disponible en ligne :
URL : cairn.info/revue-savoirs

Poissenot Claude, 2011. « Publics des animations et images des bibliothèques ». Bulletin des bibliothèques de France (BBF), n° 5, p. 87-92. Disponible en ligne : bbf.enssib.fr/consulter/

Tabah Dominique, 1997. « Le rôle social et culturel des bibliothèques vu de Bobigny ». Bulletin des bibliothèques de France (BBF), n° 1, p. 41-50. Disponible en ligne : bbf.enssib.fr

Thorel Christian, 2013. « Libraires, médiations et compétences ». Bulletin des bibliothèques de France (BBF), n° 3, p. 12-17. Disponible en ligne :
bbf.enssib.fr/consulter/bbf

Sarrazin Sylvain (2011). « Résidents impermanents ». Québec : Entre les lignes : le plaisir de lire au Québec, vol. 8, n° 1, p. 25.
erudit.org/culture