Jacques Brenner

Né le 16 septembre 1922 à Saint-Dié, mort le 20 février 2001 à Paris.

Jacques Brenner, de son vrai nom Jacques Meynard, est fils de fonctionnaire de la Poste. Il réalise ses études à Rouen après que son père y ait été nommé chef de centre des chèques postaux et obtient une licence de droit en 1945. A la même époque, il publie ses premiers essais dans Confluences.

Il s’installe sur Paris et fréquente des auteurs tels que Boris Vian et Eugène Ionesco. En 1953, il crée sa propre revue littéraire Les Cahiers des Saisons dont le but est de promouvoir les jeunes talents. Cette expérience lui permet de se faire un nom et lui permet d’accéder au poste de conseiller littéraire dans différentes maisons d’édition.

Jacques Brenner est surtout connu du public en tant qu’auteur. Il publie sa première œuvre, Les Portes de la vie, une trilogie basée sur sa jeunesse, en 1948. Son œuvre majeure est son Journal, œuvre rédigée sur cinquante ans dans laquelle le lecteur peut notamment découvrir la vie littéraire parisienne du XXème siècle.

 

Bibliographie sélective

Romans

Les Portes de la vie (1948)

Les Malheurs imaginaires (1949)

L’Atelier du photographe (1955)

La Tour Saint-André (1960)

Les Lumières de Paris (1962)

Une Femme d’aujourd’hui (1966)

Plaidoyer pour les chiens (1972)

La Rentrée des classes (1977)

Le Flâneur indiscret (1995)

Journal, 5 tomes (2006 à 2008)

Essais

Martin du Gard (1961)

 

Citation

« Stanislas se tut un instant, puis reprit : « Mes parents tenaient un magasin à Epinal. Ils vendaient des instruments de musique. Un soir d’hiver, un gamin de quinze ans demanda à voir des harmonicas. Il était mal vêtu, sans manteau malgré le froid. Je revois ses mains violettes. Mon père apporta une douzaine d’instruments, que le gosse essaya successivement. Il jouait bien et même un client servi restait à l’écouter. Après un quart d’heure, il dit : « Je réfléchirai. Aucun ne me semble absolument convenir. » Il se dirige vers la porte. Mais mon père : « Attendez un instant, je ne retrouve pas mon compte. » Le gosse s’arrête. Je le regarde attentivement, je le plains d’être aussi peu vêtu pour la saison et, de toute façon, aussi mal vêtu. Mon père reprend : « Oui,, il me manque un harmonica. » Le gosse s’écrie : « Vous pouvez me fouiller. » – « C’est ça, je vais te fouiller. » Mon père me paraît odieux. Il tête les poches du gamin et ne trouve rien. Le client et ma mère suivent la scène avec autant d’intérêt que moi. Mon père affirme : « Il me manque pourtant un harmonica », il recule d’un pas, le gamin fond en larmes, je suis près d’en faire autant. A ce moment, mon père triomphe, il désigne les jambes de pantalon du gamin, qui sont serrées en bas par une ficelle. Mon père s’agenouille, dénoue une des ficelles et alors roulent sur le plancher les objets les plus hétéroclites : une orange, un peigne, un stylo, un cadenas, une plaque de chocolat… et l’harmonica. Un silence s’établit, que rompt le client pour conseiller à ma mère : « Téléphonez au commissariat ». Le gosse n’a pas fait un geste. Mon père ramasse l’harmonica. Le client insiste : « Vous ne téléphonez pas ? » – « Non », dit mon père. Et au gosse : « Allez, file ». »

Source : Les Portes de la vie, Paris, 1948.

© La Lorraine des écrivains

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